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Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/259

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d’une disgrâce honorée, et d’un malheur sans rancune.

Une lettre de madame de Méran, datée d’Interlachen, rappela Mathilde vers ce point de la Suisse. Sa cousine lui mandait qu’elle passerait par Berne pour revenir en France, et qu’elle espérait l’y rencontrer ; elle ajoutait même que la saison étant déjà fort avancée, elle pensait que Mathilde céderait aux vœux de leur tante, et se laisserait ramener à Paris ; car madame d’Ostange ne pouvait être privée plus longtemps des soins de sa nièce et de sa petite-fille.

Mathilde sentit tout ce que cette dernière réflexion renfermait de reproches, et elle se décida à ne plus les mériter, du moins pour ce qui regardait l’absence de Thérésia. Les plaisirs du voyage étaient à leur fin ; et Mathilde, loin de vouloir permettre qu’elle la suivît dans la retraite où elle allait passer l’hiver, se détermina à la confier à madame de Méran pour la ramener à sa grand’mère.

Ce ne fut pas sans être vivement blâmée par sa cousine que Mathilde la laissa partir sans elle. Les déclamations, les prières, les railleries, tout fut employé par M. de Méran et par sa femme pour détourner Mathilde de son projet de retraite, auquel ils donnaient tous les noms qu’on prodigue ordinairement aux extravagances des gens du monde. Mais la certitude de ce qu’elle aurait à souffrir de l’observation maligne de ses ennemis, et des persécutions charitables de ses meilleurs amis, la rendirent inébranlable dans sa