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Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/88

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mené dans un état déplorable. Ce bon colonel, le croyant en danger, ne l’a pas quitté ; mais comme il est bien maintenant, je pense que Maurice reviendra ici demain, et qu’il s’empressera d’aller se justifier en vous apprenant son dévouement pour M. de Varèze.

— Vous m’étonnez, dit la baronne. Inquiètes de l’air souffrant qu’il avait chez ma nièce, nous avons envoyé chez lui, et l’on a fait répondre qu’il n’était point malade. À quoi bon ce mensonge ?

— Peut-être a-t-on cru devoir cacher son état pour n’en pas ébruiter la cause. Mais croyez que ce que je vous dis est positif.

Hélas ! Mathilde n’en doutait pas ; l’abattement qui se peignit sur son visage le disait assez. Sans doute le maréchal le remarquait, lorsqu’il ajouta :

— C’est peut-être aussi pour ménager la sensibilité de nos jolies femmes qu’on a imaginé ce mystère, et je me serais gardé de le dévoiler, s’il restait la moindre inquiétude sur la vie d’une personne si généralement chérie. Cependant j’en demande pardon à toutes nos grandes dames, mais je ne serais pas surpris que le secret eût été accordé à la seule prière du directeur de l’Opéra. On prétend que mademoiselle N…, qui n’a pas moins de droit qu’une autre à se désespérer de la mort de M. de Varèze, aurait indubitablement refusé de danser, si elle l’avait su en danger. Et l’intérêt du ballet nouveau l’a emporté sur celui de la vérité : on ne la sacrifie pas toujours si à propos, convenez-en.