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Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/92

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attacher, il fallait rassurer pour séduire. Aussi commençait-elle par établir qu’à son âge toute prétention devenait un ridicule, et qu’on ne pouvait encore faire valoir ses avantages qu’en les tournant au profit de l’amitié. Appuyée sur ce modeste soutien, elle s’élançait hardiment dans l’arène de la coquetterie, et s’y maintenait en attaquant avec autant de ruse que d’adresse.

Chaque célébrité avait des droits à sa préférence, mais une fois sa curiosité ou sa vanité satisfaite, cette préférence dégénérait en protection ; les gens distingués s’en offensaient, leur dépit en faisait de la haine, et le résultat de ces liaisons passagères était une réciprocité d’épigrammes qui divertissait également les amis et les ennemis de madame de Voldec.

Exercer une influence quelconque était un besoin impérieux pour elle ; publiait-on un ouvrage sur la politique, sur la morale, un recueil de vers ou un roman nouveau, la confidence qu’on lui en faisait était regardée comme une mesure de sûreté contre sa malveillance et les bons mots de sa coterie. Une jeune femme était-elle présentée à la cour, il fallait qu’elle demandât à l’être aussitôt chez madame de Voldec, sous peine d’encourir sa disgrâce et tous les graves inconvénients qui y étaient attachés. Enfin, soit l’empire de sa malice, ou le charme de ses flatteries, on lui rendait une sorte de culte superstitieux qui, tenant moins de l’amour que de la crainte, n’en était que plus fidèle.