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Page:Nichault - Leonie de Montbreuse.djvu/38

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prit. Enfin, il arriva. En entendant son nom, mon père se tourna de mon côté, il me vit rougir ; son regard doubla ma confusion. Il en eut pitié, et pour empêcher qu’on ne la remarquât, il me parla de choses indifférentes avec un ton si affectueux que je fus bientôt remise de mon trouble. Alfred raconta vingt histoires plus gaies les unes que les autres ; il amusait beaucoup, et l’on pouvait s’apercevoir que ce n’était pas sans en avoir formé le projet ; on aurait dit qu’il avait deviné les préventions dirigées contre lui ; et, résolu de les détruire, il se sacrifiait de la meilleure grâce possible dans tout ce qu’il racontait de lui. J’ignorais que cet excès de modestie n’est très-souvent qu’une ruse de l’amour-propre. J’en fus séduite, et me dis à moi-même, s’il est fou, au moins n’est-il pas fat ; mais plus je le trouvais aimable, et plus mon dépit s’accroissait. Je ne lui pardonnais pas d’avoir supporté les propos impertinents de madame de Rosbel, sur le compte d’une personne qui devait trouver plutôt en lui la protection d’un frère que l’ironie d’un méchant. Cette réflexion, sans cesse présente à mon