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Page:Nichault Les Malheurs d un amant heureux.djvu/280

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même les réprimandes de Bonaparte. Aussi se résigna-t-il à suivre l’avis de J…, qui lui disait :

— Allons, suis-moi chez le général en chef ; débarrasse-toi de cela tout de suite ; viens essuyer la bourrasque, et tu n’auras plus qu’à jouir du beau temps.

En effet, Gustave fut sévèrement grondé ; mais, la leçon faite, Bonaparte s’adoucit, et, satisfait d’avoir obtenu la promesse d’expier de grands torts par un peu d’humilité envers un vieux général, il redevint l’ami, le protecteur de Gustave.

Enfin, après plusieurs sorties malheureuses, Wursmer capitula, Mantoue se rendit, et nous vîmes les étendards français flotter sur le berceau de Virgile.



LVI


Dans l’ignorance où j’étais de tout ce qui se passait à l’armée, le séjour de Turin commençait à me devenir insupportable ; et, malgré mes soins à procurer à madame de Verseuil tout ce qui pouvait embellir sa retraite, je la voyais aussi fatiguée que moi d’une existence qui n’avait pour unique plaisir que l’arrivée du courrier. Enfin ce courrier nous apporta la nouvelle de la mission de mon maître ; mais, comme ses moments étaient comptés, et qu’il avait ordre de ne point s’arrêter à Turin, Amenais se décida à l’aller attendre à Chambéri ; et, dès le lendemain, nous nous mîmes en route. D’après mes calculs, nous devions l’y devancer d’un jour ; et je me promettais bien d’employer ce jour à visiter les Charmettes. Aussi, dès que j’eus installé madame de Verseuil dans la meilleure auberge de Chambéri, et préparé la chambre de mon maître, je profitai du moment où chacun était à table pour faire mon petit pèlerinage, et, muni d’un morceau de pain et de quelques châtaignes, je m’acheminai vers le bocage, en suivant un des bras de l’Albane qui arrose cette promenade. Là, je demandai le chemin des Charmettes à quelques enfants qui se battaient pour se réchauffer.

— Vous voulez sans doute voir la maison de M. Rousseau,