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Page:Nietzsche - Aurore.djvu/344

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AURORE

jours dans une même façon d’amour et toujours dans un même égoïsme et une même jouissance de soi ! Être en possession d’un pouvoir et demeurer cependant caché, renonciateur ! Être sans cesse couché au soleil de la douceur et de la grâce et savoir cependant que l’accès du sublime est à portée de la main ! — Voilà qui serait une vie ! Voilà qui serait une raison pour vivre longtemps !

450.

La séduction de la connaissance. — Sur les esprits passionnés un regard jeté sur le seuil de la science agit comme la séduction des séductions ; il est à prévoir que ces esprits deviendront ainsi des imaginatifs et, dans le cas le plus favorable, des poètes : tant est grand leur désir du bonheur de la connaissance. Ne vous saisit-il pas par tous les sens, — ce ton de douce séduction que prend la science pour annoncer sa bonne parole, avec cent paroles et le plus merveilleusement dans la cent unième : « Fais disparaître l’illusion, et le « malheur à moi ! » disparaîtra en même temps ; et avec le « malheur à moi » s’en ira aussi la douleur » (Marc Aurèle).

451.

Ceux qui ont besoin d’un fou de cour. — Ceux qui sont très beaux, très bons, très puissants, n’apprennent presque jamais, quel que soit le sujet, la vérité entière et vulgaire, — car, en leur présence, on ment involontairement un peu, parce que l’on