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Page:Nietzsche - Aurore.djvu/353

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AURORE

Je te vois immobile depuis longtemps. — B : C’est toujours la même chose, toujours nouvelle pour moi ! L’intérêt que suscite une chose me la fait poursuivre si loin que je finis par arriver au fond et par m’apercevoir qu’elle ne valait pas toute la peine que je me donne. À la fin de toutes ces expériences, il y a une espèce de tristesse et de stupeur. Ceci m’arrive en petit jusqu’à trois fois par jour.

466.

Perte dans la gloire. — Quel avantage de pouvoir parler aux hommes en inconnu ! Les dieux nous prennent « la moitié de nos vertus » en nous enlevant l’incognito et en nous rendant célèbres.

467.

Double patience ! — « Tu causes ainsi de la souffrance à beaucoup d’hommes. » — Je le sais et je sais aussi qu’il faudra que j’en pâtisse doublement, d’une part à cause de la compassion que j’aurai avec leur douleur et, d’autre part, à cause de la vengeance qu’ils tireront de moi. Mais malgré cela, il est nécessaire que j’agisse ainsi.

468.

L’empire de la beauté est plus grand. — De même que nous nous promenons dans la nature, astucieux et contents, pour surprendre dans toute chose sa beauté propre, comme en flagrant délit, de même que, tantôt au soleil, tantôt sous un ciel orageux, nous faisons un effort pour voir tel