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Page:Nietzsche - Aurore.djvu/379

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AURORE

520.

L’éternelle cérémonie funèbre. — À écouter l’histoire tout entière on pourrait croire que l’on entend une continuelle oraison funèbre : on a toujours enterré et l’on enterre encore ce que l’on a de plus cher, pensées et espoirs, on en reçoit et on en a reçu en retour de la fierté, gloria mundi, c’est-à-dire la pompe du discours mortuaire. C’est ainsi que tout doit s’arranger ! Et celui qui prononce l’oraison funèbre est encore le plus grand bienfaiteur public !

521.

Vanité d’exception. — Celui-ci possède une haute qualité, qui sert à sa propre consolation : son regard passe avec mépris sur le reste de son être — et presque tout fait partie de ce reste ! Mais il se repose de lui-même lorsqu’il s’approche de cette façon de sanctuaire ; le chemin qui y mène lui apparaît déjà comme une montée sur des marches larges et douces : — et, cruels que vous êtes ! vous voudriez l’appeler vain à cause de cela.

522.

La sagesse sans oreilles. — Entendre quotidiennement ce que l’on dit de nous, ou même chercher à découvrir ce que l’on pense de nous, — cela finit par anéantir l’homme le plus fort. C’est pour garder quotidiennement raison contre nous que les autres nous laissent vivre ! Ils ne nous toléreraient