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Page:Nietzsche - Humain, trop humain (1ère partie).djvu/255

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HUMAIN, TROP HUMAIN


la conséquence de la foi : Vous allez dès à présent sentir l’avantage de la foi, expliquait-il, vous allez devenir heureux par elle. En fait, c’est ainsi que l’État se conduit, et tout père élève son fils de pareille façon : Tiens seulement cela pour vrai, dit-il, tu sentiras comme cela fait du bien. Mais cela signifie que de l’utilité personnelle que rapporte une opinion, on est censé tirer la preuve de sa vérité ; le rapport d’une théorie passe pour garantie de sa sûreté et de sa justification intellectuelles. C’est comme si le prévenu disait devant le tribunal : Mon défenseur ne dit que la vérité, car regardez seulement ce qui suit de son discours : je serai acquitté. — Comme les esprits serfs ont leurs principes à cause de leur utilité, ils conjecturent de même à l’égard de l’esprit libre, qu’il cherche également son utilité par ses convictions et ne tient pour vrai que ce qui l’édifie. Or, comme ce qui paraît lui être utile est justement l’opposé de ce qui est utile à ses compatriotes ou confrères, ils admettent que ses principes leur sont dangereux ; ils disent et sentent ceci : Il ne peut pas avoir raison, car il lious cause du dommage.

228.

Le caractère fort et bon. — La servitude des convictions, devenue par l’habitude instinct, conduit à ce que l’on nomme force de caractère. Quand quelqu’un agit par un petit nombre de motifs,