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Page:Nietzsche - Humain, trop humain (1ère partie).djvu/369

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HUMAIN, TROP HUMAIN

revoyons jamais sa figure et sa beauté originelles, — On perd toujours au commerce trop intime de femmes et d’amis ; et parfois on y perd la perle de sa vie.

429.

Le berceau d’or. — L’esprit libre respirera toujours, quand il se sera enfin résolu à secouer ces soins et cette vigilance maternels dont les femmes l’entourent. Quel mal peut donc lui faire un air un peu rude, qu’on écartait si anxieusement de lui, que signifie un désavantage réel, une perte, un accident, une maladie, une dette, une séduction de plus ou de moins dans sa vie, comparé au manque de liberté du berceau d’or, de cet étalage de paon faisant la roue et du sentiment pénible de devoir encore être reconnaissant parce qu’il est surveillé et gâté comme un nourrisson ? C’est pourquoi le lait que lui verse la sollicitude maternelle des femmes de son entourage peut si facilement se changer en fiel.

430.

Victime volontaire. — Il n’est pas pour les femmes de mérite un meilleur moyen de rendre la vie facile à leurs maris, lorsqu’ils sont célèbres et grands, que de devenir comme le réceptacle de la défaveur générale et de la mauvaise humeur occasionnelle des autres hommes. Les contemporains ont coutume de passer à leurs grands hommes bien des