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Page:Nietzsche - Humain, trop humain (1ère partie).djvu/389

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HUMAIN, TROP HUMAIN

autres peuvent être assouvis : pour cela la société dominante a toujours assez de ressources et d’habileté. Le péril commence aussitôt que le but devient impersonnel ; les révolutionnaires par intérêt impersonnel peuvent considérer tous les défenseurs de l’état de choses existant comme égoïstes et par là se sentir supérieurs à eux.

455.

Importance politique de la fraternité. — Quand l’homme n’a pas de fils, il n’a pas un droit intégral à délibérer sur les besoins d’un État particulier. Il faut qu’on y ait, comme les autres, hasardé ce qu’on a de plus cher : cela seul attache solidement à l’État ; il faut que l’on considère le bonheur de sa postérité, partant qu’on ait avant tout une postérité, pour prendre à toutes les institutions et à leur changement une part équitable et naturelle. Le développement de la morale supérieure dépend de ce que chacun ait des fils ; cela l’affranchit de l’égoïsme, ou plus justement, cela étend son égoïsme dans la durée et fait qu’il poursuit avec zèle des fins qui vont au delà de son existence individuelle.

456.

Fierté des aïeux. — On peut à juste titre être fier d’une lignée ininterrompue d’aïeux bons de père en fils, — mais non pas de la lignée même ; car chacun en a tout autant. La descendance