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Page:Nietzsche - Humain, trop humain (1ère partie).djvu/449

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HUMAIN, TROP HUMAIN

un précipice ou franchir un ruisseau profond sur une poutre, on a besoin d’un garde-fou, non pour s’y retenir, — car il se briserait aussitôt avec l’homme — mais pour donner à l’œil l’idée de la sécurité : de même on a besoin, à ses débuts, de personnes qui nous rendent inconsciemment le service de ce garde-fou. Il est vrai qu’elles ne nous aideraient pas, si nous voulions réellement nous appuyer sur elles dans un grand danger, mais elles donnent l’impression tranquillisante de la protection dans le voisinage (exemples, les pères, maîtres, amis, tels qu’ils sont en effet tous les trois d’ordinaire).

601.

Apprendre à aimer. — Il faut apprendre à aimer, apprendre à être bon, et cela dès la jeunesse ; si l’éducation et le sort ne nous donnent pas l’occasion de nous exercer à ces sentiments, notre âme devient sèche et même impropre à l’intelligence de toutes ces tendres inventions d’hommes aimants. De même, la haine doit être apprise et nourrie, si l’on veut être un bon haïsseur : autrement le germe en mourra aussi peu à peu.

602.

Les ruines servant de parure. — Tels qui passent par beaucoup de transformations d’esprit conservent quelques idées et habitudes d’états anté-