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Page:Nouvelles de Batacchi, (édition Liseux) 1880-1882.djvu/62

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LE ROI BARBADICANE


Au vif déplaisir du tailleur, le grand jour
Arriva ; il mit ses habits de gala,
Ensuite, il se présenta, bien triste, à sa femme,
La serra sur son cœur et lui parla ainsi :
« Ma belle Grâce, mon sort cruel
» Veut que je te quitte : ah ! me seras-tu fidèle ?

» Ce n’est pas l’ambition qui me mène à la Cour,
» C’est un ordre du Roi auquel je n’ose désobéir !
» Tout est pour moi tourment, et douleur, et mort
» Quand je ne vois pas ton aimable visage ;
» Reste ici, toi, mon bien, et ne me trahis pas
» Si tu ne veux me faire mourir de chagrin. »

Il dit, et de nouveau la presse bien fort sur son cœur,
Et elle : — « N’aie aucune crainte, »
Lui dit-elle, « point ne romprai ce lien qui m’a uni à toi,
» Ce lien d’amour et de fidélité ;
» Je ne ferai ainsi ni bien ni mal, c’est mon devoir ;
» Cependant, je désire obtenir une faveur. »

— « Demande, mon cœur, » répondit le tailleur.
— « Une si belle fête, » ajouta-t-elle, « je voudrais
» La voir, moi aussi ; tu sais que la chapelle
» Royale de la Cour est tout près de chez nous :
» Je voudrais, sur la petite place d’ici toute voisine,
» Voir passer le Roi avec la Reine.

» Je ne me mets jamais à la fenêtre du côté de la rue,
» Tu me tiens enfermée et tu en es le maître ;
» Mais tu voudras bien, j’espère, m’ouvrir le balcon,
» Mon doux époux, pour cette occasion.
» Qu’en dis-tu ? » Le tailleur réfléchit un instant,
Puis il répondit : — « Eh bien ! je te promets de l’ouvrir.