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Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/43

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parfois s’aidant de ses pattes malhabiles, il cherchait à se l’arracher et à la poser par terre, pour ensuite courir plus librement. Savait-il que des saints renommés en avaient usé de la sorte avec la leur ?

Malgré cette préoccupation hagiographique, sa physionomie commençait à se dégager des hésitations, des incohérences de l’ébauche initiale, à prendre un caractère que je ne pourrais pas bien définir d’un mot, qui était, qui allait être plutôt de la gravité, de la gaîté, de la malice, une sorte d’effronterie bizarre et gracieuse… Quoi encore ?… De la cruauté, peut-être ?… Peut-être de la bonté ?… Enfin quelque chose d’impétueux et de calme à la fois, quelque chose de comique et de noble, de candide et de rusé… je ne sais trop… ce que vous voudrez, après tout.

N’ayant pas encore assez de muscles, il avait les nœuds des articulations trop saillants, la peau mal tendue sur l’ossature, ici plissée, lâche et flottante, là trop ajustée, trop étroite, comme si elle n’eût pas été taillée pour lui et qu’on l’eût achetée dans un magasin de confections, au petit bonheur. Il avait les pattes trop fortes, pareilles à celles des jeunes lions ; les oreilles trop molles, trop ouvertes, intérieurement bourrées de peluches protectrices et passagères qui, à chaque pointe, s’ébouriffaient en aigrettes, comme chez les gué-