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Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/227

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abattit toutes les douanes intérieures et engloba les provinces orientales et occidentales de la monarchie des Hohenzollern dans un même système douanier. Le Zollverein fut couronné en 1870 par la constitution de l’Empire allemand. Il en a été le précurseur et l’élément préparateur par excellence. C’est que non seulement il arriva à accroître considérablement l’activité commerciale des associés, mais les ; conséquence morales furent plus grandes encore. À mesure que les relations devenaient plus actives entre les provinces allemandes, les préjugés tombaient, une opinion publique se créait, les mêmes courants de désir et de passion soulevaient les âmes des Alpes à la Baltique et de Carlsruhe à Königsberg (Denys et Sayous)[1].

L’idée du Zollverein s’est encore développée en Allemagne après 1870. L’Allemagne a projeté un Zollverein de l’Europe centrale qui devait s’étendre sur la Hollande et sur la Belgique. Bismarck avait même songé à y comprendre la France. Le projet prévoyait diverses combinaisons variées et très simples. Un parlement douanier et un Conseil fédéral douanier pour délibérer des affaires douanières de toute la confédération, ou bien concevoir une confédération étroite, à laquelle seraient attachés, par de simples traités de commerce permanents, les États non encore réduits à la vassalité économique totale. L’union douanière pouvait être commune, libre échangiste ou à protection échelonnée au dedans, mais fortement protégée au dehors[2].

Un fait peu connu, c’est que, menacée par le voisinage du Zollverein, la Belgique songea à négocier un arrangement de même nature avec la France. On était en 1842. Les industriels des départements du Nord et du Pas-de-Calais repoussèrent avec force l’éventualité de la concurrence des produits flamands, et d’ailleurs Robert Peel rappela à Guizot que la Belgique, étant neutre, n’avait pas le droit d’aliéner son indépendance, même volontairement. Les affaires en restèrent là : il n’y eut point de Zollverein français.

3. Groupements économiques après la guerre. — À défaut de la liberté économique universelle, les grands hinterlands sont une nécessité économique, comme la concentration capitaliste est une nécessité financière. Aussi, pendant la guerre même, a-t-on vu s’esquisser les deux futurs groupements commerciaux appelés à se partager le monde, si une entente générale n’intervient.

A) Une Union économique des alliés est proposée, étudiée, appuyée. Elle comprendrait les États de la Quadruple-Entente, leurs alliés et les États neutres qui seront admis à en faire partie. Elle aurait pour but

  1. E. Worm, L’Allemagne économique ou Histoire du Zollverein. — Richelot, Le Zollverein.
  2. Paul Dehn, Deutschland und den Orient (1884) ; Deutschland nach Osten (1888).