Aller au contenu

Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/288

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

orientation sociale et démocratique à l’Église ; Ainsi l’autorité religieuse au cours du XIXme siècle a suivi une marche parallèlement inverse à celle de l’autorité politique. Tandis que dans l’État les pouvoirs souverains abdiquent de plus en plus, de gré ou de force, entre les mains de la démocratie grandissante, l’Église, elle, a achevé son mouvement de concentration autour du saint-siège romain. « L’histoire de la Papauté contemporaine, dit Mgr. Bonnard, semble comprendre trois périodes remplies par trois œuvres qui sont : une œuvre de réparation, celle qui au lendemain de toutes les ruines s’inaugure par le concordat et qui va de Pie VII et de ses premiers successeurs jusqu’à la fin de Grégoire XVI. Une œuvre de centralisation, celle qui par une longue suite d’actes convergants et aux prix de longs combats contre le gallicanisme et le libéralisme, ramène le mouvement catholique à l’unité romaine, unité de doctrine, de liturgie, d’action et de juridiction, pour finalement atteindre son terme dans les définitions du Concile du Vatican. C’est le pontificat militant et constituant de Pie IX. Enfin une œuvre d’expansion, celle où la Papauté ainsi solidement assise dans sa force et son droit, fait appel à toutes les puissances terrestres, les puissances d’en-haut et les puissances d’en-bas, les gouvernements et les peuples, pour leur montrer la voie, la vérité, la vie, étendant à tous les domaines de l’ordre moral et social sa sphère d’action et d’influence, universellement respectée par ceux mêmes qui ne reconnaissent pas son autorité et sa loi. C’est le pontificat conquérant et pacifiant de Léon XIII[1]. » La promulgation du dogme de l’Immaculée conception en 1854, le syllabus en 1864, le dogme de l’infaillibilité pontificale en 1871 ont marqué les trois directrices de la constitution ecclésiastique romaine : La Foi triomphante de la Raison ; le pouvoir ecclésiastique dominateur du pouvoir civil ; la hiérarchie religieuse régie par une autorité absolue.

3. Pouvoir temporel du pape. — En 1870 les Italiens entrèrent à Rome et le pape fut dépouillé de ses États pontificaux. Une loi, dite des « garanties », fut ensuite votée par les chambres italiennes (loi du 13 mai 1871 sur les prérogatives du souverain pontife et du Saint-Siège et sur les relations de l’État avec l’Église). Cette loi, bien qu’elle ne constitue au regard du droit international qu’un acte unilatéral, en déterminant les prérogatives diplomatiques du pape a néanmoins établi une sorte de droit public coutumier, dont les règles principales dominent encore les rapports de quelques puissances catholiques avec le Saint-Siège, bien que les premiers et celui-ci les aient toujours officiellement ignorées. Le ministre des affaires étrangères d’Italie, le marquis Visconti Venosta, a simplement adressé une circulaire aux

  1. Th. Bonnard, Recteur de l’Université catholique. Un siècle de l’Église en France, 1800-1900, page 1-12. — Abbé Turnile, Histoire du dogme de la Papauté (1908).