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Page:Otlet - Traité de documentation, 1934.djvu/140

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DOCUMENTS BIBLIOGRAPHIQUES

241.22 Encyclopédie. Dictionnaire.
241.221 NOTIONS.

a) L’encyclopédie est l’ouvrage qui traite ou prétend traiter de toutes les sciences humaines. L’encyclopédie est aussi le terme donné à la connaissance de tout ce que l’homme peut savoir. Le mot vient du grec enkuklopaideia qui signifie littéralement cercle de sciences, de en dans, kuklos cercle et paideia, instruction science.

b) Le mot encyclopédie a reçu cinq sens différents : 1° l’encyclopédie dite universelle : l’ensemble d’une science dans toutes ses notions abstraites et concrètes ; 2° l’encyclopédie dite vulgaire : notions sommaires sur toutes les parties d’une science ou des sciences ; c’est l’encyclopédie des gens cultivés ; 3° l’encyclopédie comme science préliminaire, notamment pour préparer aux études ; 4° l’encyclopédie comme science complémentaire (compléter les lacunes des études) ; 5° l’encyclopédie philosophique : ensemble des généralités abstraites et permanentes d’une science : les normes ou premiers principes ; les constantes.[1]

c) L’encyclopédie répand des connaissances sur tout ce qu’il n’est plus permis à personne d’ignorer : science, industrie, technique, histoire, art, société. Elle permet de suivre partout le mouvement grandissant de l’évolution humaine. À notre époque la curiosité de la pensée est devenue générale et l’encyclopédie est devenue l’outil de cette curiosité. C’est l’âge où la riche matière des dictionnaires se systématise en encyclopédies méthodiques.

Nous sommes, disent toutes les œuvres, à l’âge de l’encyclopédie. Elles ajoutent : l’esprit le mieux nourri n’est pas celui qui connaît les choses, mais celui qui sait où les trouver (n’est-ce pas là une nouvelle version de la primitive devise de l’Institut International de Bibliographie : « Quid scit ibi scientiae habendi est proximus » ). Il faut créer l’habitude de recourir à l’encyclopédie (Encyclopedia habit). L’encyclopédie est la pierre angulaire (Cornerstone) de la Bibliothèque. Elle est le lien entre tous les livres. La voilà pénétrant déjà dans l’école et de là elle pénétrera à la maison, comme le dictionnaire a débuté aussi par l’école aux États-Unis. Elle est le moyen illimité de répondre aux questions sans limites. Pas besoin comme aux livres d’index placé à la fin ; tout sujet, si large ou si spécial, figure à sa place alphabétique propre. Et ils ajoutent encore : les connaissances qui ont coûté à l’homme des centaines de millions, on les achète aujourd’hui pour un prix vraiment insignifiant.

d) Les ouvrages en la forme dictionnaires sont utiles pour concentrer des renseignements nombreux où l’on se préoccupe plus de la précision et de la « monographie de chaque sujet » que de leurs liens de dépendance et de connexion. Ce sont par excellence des ouvrages que l’on consulte au lieu de les lire de la première à la dernière page. Les Dictionnaires comme les Encyclopédies sont des instruments plus souples que les infidèles mémoires. Ils les aident et laissent les hommes plus libres, plus dispos. Ils fournissent vite, à toute heure, suivant les besoins de l’instant, les renseignements, la documentation de la vie, des sciences, des métiers. Ainsi l’instrument d’information par excellence est le dictionnaire dont la forme offre un ordre plus large, mais de consultation plus aisée que l’ordre logique ou scolaire des questions.

Un dictionnaire se compose de notices et chaque article étant un tout complet par lui-même, est plus compréhensible que les parties des traités qui reposent sur l’exposé antérieur. On peut donc les comprendre directement et par là tout en restant scientifique, on obtient un résultat de vulgarisation. On vise à donner l’exposé complet et scientifique des faits connus jusqu’à ce jour.

e) Il y a inconvénients et avantages à la forme dictionnaire : il est impossible d’y trouver une question traitée dans son ensemble et il faut aller en chercher les éléments dans dix articles et parfois dans dix volumes. C’est le morcellement arbitraire et indéfini avec les doubles emplois et les répétitions innombrables. C’est l’absence complète de méthode et d’unité mal dissimulée par la régularité apparente que consacre l’ordre alphabétique. La lenteur avec laquelle paraissent les volumes et le nombre auxquels ils s’élèvent lassent souvent la patience du public.

Un traité et un dictionnaire ne rendent pas les mêmes offices. Quand on cherche un renseignement précis sur un point quelconque, on le trouve rarement dans un traité dogmatique. Ceux-ci étant des ouvrages classiques doivent être courts et peu coûteux, insuffisants et détaillés. Un dictionnaire facilite les recherches par le fait d’un vocabulaire détaillé. Certains articles très généraux sur des questions fondamentales peuvent constituer de véritables monographies rapprochant le dictionnaire du traité.

Une science pour être complète doit sortir des limites trop étroites où on la tient souvent enchaînée et envahir les domaines qui lui étaient autrefois interdits en les traitant du point de vue de la science envisagée.

Certes, sur ces sciences connexes, on n’utilisera que des livres communs et des mémoires déjà publiés, sans prétendre user du neuf ; mais ce sera déjà une œuvre bien importante que de rassembler les données éparses, de manière à les présenter dans leur ensemble. En outre, l’histoire d’une science, la biographie et la bibliographie ne sont guère présentées dans les traités. En conclusion, le dictionnaire n’est pas le manuel ni le traité. Il n’a ni la belle ordonnance ni l’enchaînement des idées qu’on admire dans ces ouvrages. L’ordre alphabétique s’y oppose. Il brise fatalement la suite logique, les intéressantes discussions sur les points controversés. En revanche

  1. Comp. E. Picard. Les constantes de droit, 1921, p. 1.