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Page:Otlet - Traité de documentation, 1934.djvu/146

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DOCUMENTS BIBLIOGRAPHIQUES

paraissant périodiquement (notamment les journaux de modes et les publications publicitaires). Au sens restreint un périodique ou « publication en série » (serial publication) est toute publication paraissant à des intervalles réguliers ou irréguliers, avec un numérotage consécutif et avec un terme non fixé d’avance.[1] Elle est sauf exception due à une collaboration. En général, elle est spécialisée quant au sujet et quant aux pays, régions ou localités. Le mot « Magazine » emprunté à la langue anglaise, désigne un périodique illustré paraissant ordinairement une fois par mois. Le IXe Congrès international des Éditeurs a donné du périodique cette définition (au point de vue des tarifs postaux) « les Publications, Journaux et Revues, Recueils, Annales, Mémoires, Bulletins (en collection) paraissant au moins une fois par trimestre » — la Bibliothèque Nationale de Paris, beaucoup plus large, étend la définition aux publications paraissant plus d’une fois par an. D’après le tarif postal français, cessent d’être considérées comme périodiques les publications paraissant moins d’une fois par mois.

b) Les connaissances relatives aux périodiques (sciences et arts du périodique) ont droit à des noms similaires aux autres connaissances et elles donnent lieu à une distribution ou classification analogue. En conséquence : 1° Périodicologie sera le nom de la science du périodique ; elle observera et décrira (périodicographie) ; elle expliquera par causes et effets, par genèse et état de coexistence ; elle systématisera dès lors en lois (périodiconomie) ; elle commencera donc en analyse et elle finira en synthèse. 2° Périodicotechnie sera le nom de l’art du périodique ; la manière de le rédiger, éditer, diffuser, conserver au mieux et avec le maximum d’efficience. 3° La périodicoéconomie sera le nom de l’ensemble des mesures tendant à organiser les efforts pour donner aux périodiques, dans la société, au degré local, régional, national, international, toute l’expansion que mérite leur utilité.

c) Quelques chiffres donneront une idée du nombre des périodiques. En Belgique il oscille autour de 2,200. Une liste des périodiques du monde parus de 1900 à 1921 et se trouvant dans les Bibliothèques de Grande-Bretagne a relevé 24,678 titres. Le tirage des périodiques est fort différent de l’un à l’autre. Le tirage de « feuilles de loisir », par exemple, est considérable en Allemagne : la Berliner Illustrierte Zeitung a un tirage de 1,753,580 exemplaires, la Münchener Illustrierte Presse 700,000, la Kölnische Illustrierte, 300,000.

241.312 HISTOIRE, ÉVOLUTION DES PERIODIQUES.

L’histoire des périodiques est rendue difficile parce que l’on a peine à distinguer les commencements de ce que nous appelons une Revue. Au début, la dénomination de Journal, qui a prévalu plus tard sur celle de Gazette, fut d’abord réservée aux recueils littéraires et scientifiques. On appelait alors Journal un ouvrage périodique qui contenait les extraits des livres nouvellement imprimés avec en détail des découvertes que l’on fait tous les jours dans les arts et dans les sciences (encyclopédie). Ce fut, disait-on, un moyen inventé pour le soulagement de ceux qui sont ou trop occupés ou trop paresseux pour lire les livres entiers.

1. On a distingué cinq époques dans l’histoire de la littérature périodique : 1° sa naissance au XVIIe siècle ; 2° son jubilé au XVIIIe quand en Angleterre Addison et Steele produisirent leurs brillants travaux ; 3° sa rapide expansion dans la première moitié du XIXe siècle ; 4° la révolte des spécialistes dans la dernière moitié du siècle ; 5° la vaste production d’aujourd’hui avec comme objectif l’approbation du public.

2. La France et l’Angleterre ont marché de pair pour le développement de la presse périodique, l’une ou l’autre étant première pour tel genre ou pour tel genre. Le développement a été similaire en Allemagne, mais avec moins d’intérêt pour le périodique qu’en Angleterre.

3. Le commencement du périodique est marqué par la publication des catalogues de livres, avec bientôt des notices et commentaires. Puis paraissent en France le Journal des Savants (1665), Nouvelles de la République des Lettres de Bayle, les Mémoires de Trévoux ; en Grande-Bretagne les Acta Philosophica (1665), les Philosophical Transactions (1665) de la Royal Society ; en Allemagne les Acta Eruditorum (1682). Vinrent ensuite des appréciations critiques par des hommes compétents, puis des contributions originales, des mémoires. Il fallut pour faire le Journal des Savants (1665) une large collaboration. Dès 1702, l’abbé Bignon institua une compagnie pour continuer le « Journal des Savants ».

4. Le XVIIIe siècle commence l’« essai » et conçoit le périodique comme un type : Spectator (1711) Gentleman’s Magazine, Guardian (1712). La politique commence à être mêlée à la littérature. On tire jusqu’à 4,000 exemplaires. Mais le Stamp Act vient apporter un frein à la franche critique. Trait caractéristique au XVIIIe siècle, on voit en Amérique chaque ville de quelque importance désirer avoir sa propre revue exprimant l’opinion de la ville et dirigeant le goût littéraire des habitants.

5. Au début du XIXe siècle paraissent en Angleterre des revues de haut style. Edinburgh Review (1802) qui se continua 127 ans jusqu’en 1929, Quarterly et Blackwood qui proclama « qu’il voulait relever le goût en littérature et appliquer les principes philosophiques et les maximes de vérité et d’humanité à la politique. »

6. Dans les 50 dernières années naquit le Magazine populaire (All the Year Round, 1859) ; Cornhill (1860), Mac Millan’s Magazine (1860). On voulait distraire le

  1. Voir définition de la Manchester Union List, 1898. Leigh Repts of Proc. of the 55th meeting of the Library Association.