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Page:Otlet - Traité de documentation, 1934.djvu/25

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124.4
BIBLIOLOGIE

gentine, 1924) », demeure une source générale pour la statistique des bibliothèques. — Dans le Jahrbuch der Deutschen Bibliotheken 1929 a été donnée la carte des bibliothèques et instituts allemands.

124.4 La Mathé-Bibliologie.

1. Une place aux mathématiques doit être faite dans la Bibliologie. Toutes les sciences tendent sinon à prendre la forme mathématique, tout au moins à recourir à l’aide des mathématiques comme à une méthode de recherche complémentaire (physique, chimie, biologie, mathématique, sociologie, économie mathématiques). L’absence presque complète de travaux théoriques de cet ordre n’est pas un motif suffisant pour ne pas introduire le sujet dans le cadre général de la systématique de la Bibliographie. La Mathé-bibliologie se rattache à tout ce qui est de la mesure du livre (statistique du livre, bibliométrie).

La mathématique constitue un langage. Elle exprime les rapports logiques entre les faits objectifs. Dans le domaine social, elle est le moyen de mettre en œuvre et d’utiliser la statistique et de la relier, par un système de relations exactes, aux lois définies par la sociologie. On a montré, par exemple, qu’il est possible d’introduire l’économie dans le domaine des sciences précises, comme une théorie mathématique analogue à la théorie statistique des gaz par exemple, ou même à la thermodynamique en général.

On a montré, en un autre exemple, que dans chaque nation il existe un rapport mathématique entre les prix de détail, le salaire et le nombre de chômeurs.[1]

13 MÉTHODE DE BIBLIOLOGIE

131 Généralités.

1. En général les méthodes valables dans les autres sciences le seront en Bibliologie. Mais il faut réfléchir à ces applications, en examiner la légitimité, voir comment on peut en étendre l’usage et les assouplir, sans en diminuer la rigueur, pour les conformer aux exigences des recherches dans les domaines nouveaux.

Venant après tant de sciences, la Bibliologie doit composer sa méthode de la comparaison de toutes les méthodes. A. Observation. B. Expérimentale : les nouveaux livres. C. Historique. D. Déductive. E. Inductive. F. Mathématique (emploi des symboles). G. Statistique.

Les mathématiques ont été primitivement empiriques et inductives ; les sciences de la nature tendent à devenir comme les mathématiques conceptuelles et déductives. Il y aurait lieu de faire un effort pour traiter la documentation à la manière abstraite et de constituer par raisonnement des systèmes documentaires qui seront simplement possibles.

2. Les règles de la méthode scientifique consistent essentiellement à dénombrer les divers facteurs intervenant dans le problème posé et à élucider successivement l’influence de chacun d’eux pris isolément, tous les autres étant maintenant invariables.

Conformément donc à la méthode dans toutes les autres sciences : il s’agit : a) de déterminer les faits particuliers ; b) après avoir établi ces faits, de les grouper en une construction méthodique ou système pour découvrir les rapports entr’eux. On doit isoler les faits pour les constater, les rapprocher pour les comprendre.

La première question est donc d’établir la manière de déterminer les faits. Elle consiste dans l’observation directe des faits. Mais le procédé est insuffisant. Beaucoup de faits sont passés et ce n’est que par les traces qu’ils ont laissé dans les documents que nous pouvons en avoir connaissance. D’autre part, les faits sont épars avec les objets même de la bibliologie : les livres. Il est impossible à un homme seul de procéder à l’observation personnelle et directe de tous ces faits. Force est donc d’ajouter à cette observation celle des autres observateurs et de combiner les observations propres avec des documents rédigés par les autres observateurs. Observation directe et méthode indirecte par les documents, tels sont donc les deux moyens d’arriver à déterminer les faits de la Bibliologie.

3. Les sciences, les techniques et les organisations les plus avancées constituent aussi des modèles dont il y a lieu de s’inspirer et de tenir compte pour sa constitution. En se poursuivant en toute autonomie, elle peut par ses desiderata, ses initiatives et ses inventions, offrir elle-même des modèles aux autres sciences, techniques et organisations.

4. Une science complète des faits et théorie ; l’esprit d’observation et la spéculation. Ainsi la science linguistique par ex. est formée de l’histoire linguistique (fait) et de la psychologie linguistique (théorie). La science documentaire sera donc constituée : a) de l’Histoire du Livre et du Document (faits observés) ; b) de leur interprétation idéologique : Psychologie, Technologie, Sociologie.

5. Le Livre est un objet d’observation bibliologique. De même qu’un mathématicien, un chimiste, un biologiste sauront, dans les objets qu’ils observent, ne considérer que les caractères qui fondent leur science propre, de même le bibliologue sait dans un livre ne voir que les caractères bibliologiques en laissant de côté le contenu même du livre, le sujet traité. Ainsi à un chimiste importe peu s’il analyse les matières organiques du corps d’un lapin ou d’un poulet. On a donc introduit la mé-

  1. F. Arnould : Theoritical study of unemployment, 1932.