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Page:Otlet - Traité de documentation, 1934.djvu/356

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LES ARCHIVES (ARCHIVES ANCIENNES)

4. — Inventaire et mode de conservation.

a) Partout où la chose est possible, il faut classer les archives comme elles le furent à l’époque où existèrent les corps et administrations dont elles proviennent et l’inventaire doit refléter ce classement. Le rétablissement de ce classement primitif est presque toujours possible. La durée éternelle, à laquelle on doit viser dans les travaux de l’espèce ne peut être obtenue que par les inventaires basés sur le classement rationnel ressortant des archives mêmes. Il faut donc respecter les fonds (principe de provenance) et donner dans l’inventaire une image exacte de l’organisme ou de l’institution dont on veut faire connaître les archives. (J. Cuvelier). « Un fonds d’archives bien ordonné doit offrir dans la distribution des documents l’image extérieure de la structure organique de l’État, comme le bon architecte laisse deviner dans la façade la destination et la structure interne de l’édifice » (Léopoldo Galcotti).

b) Un effort considérable a été fait dans la plupart des pays pour opérer le dépouillement systématique des archives : tableaux, index, répertoires, inventaires et catalogues d’actes. Les archives ainsi traitées analytiquement sont les matériaux classés de l’histoire. Les ouvrages synthétiques d’histoire peuvent vieillir, ne plus répondre à la conception de l’heure, tandis que les archives demeurent permanentes. « La tâche de l’archiviste doit consister exclusivement, dit J. Cuvelier, à faire des travaux d’analyse qu’il mettra à la disposition de l’historien. Sic vos non vobis. Pendant ses heures de bureau, l’archiviste sera l’encyclopédiste de l’histoire, fournissant tour à tour des renseignements sur les documents de toutes les parties de l’histoire. » — R. Galli a proposé de former à Rome une collection complète des inventaires imprimés de tous les dépôts d’archives du monde (Nuova Antologia, juillet 1895).

c) Les archives anciennes sont conservées sous trois formes : registres, dossiers, cartons. Les registres présentent la forme d’origine que l’on ne saurait modifier. Les cartonniers doivent être évités autant que possible, sauf pour les chartes et diplômes (parchemins et sceaux) qui doivent être placés sous enveloppes et rassemblés en cartons qui les protègent. Les dossiers constituent le mode le plus pratique. Ils sont extensibles à volonté, ils prennent donc le minimum de place et, disposés sur les rayons, on s’aperçoit facilement qu’ils ont été déplacés.

5. — Centralisation.

On a projeté en France de faire dépendre d’une seule administration les archives de tous les ministères. En Autriche, M. Redlich a demandé que les archives forment un organisme unique qui embrasserait toutes les archives de l’État, tant des administrations centrales que provinciales, et comprendrait un personnel commun avec une direction scientifique M Mayr y a proposé que toutes les archives soient réunies dans un même bâtiment. Napoléon 1er conçut la pensée de réunir à Paris les archives de l’Europe entière et il y envoya pour commencer celles du Vatican, du Saint-Empire, de la Couronne de Castille, etc., que l’on dût plus tard restituer.

6. — Rapport entre la documentation administrative et les archives.

On désigne sous le nom d’archives les dépôts de titres et de documents authentiques de toute espèce qui intéressent un État, une personne, une ville, un établissement public ou privé, une compagnie, un particulier. Des relations organiques doivent être établies entre les archives courantes qui constituent la documentation des administrations et les archives anciennes. 1° Il est désirable de voir les grandes administrations transférer périodiquement aux archives de l’État les documents devenus inutiles pour le service courant et désignés de commun accord par une commission composée de fonctionnaires des administrations et des archives de l’État. Le transfert est une opération qui a pour but le désencombrement, la sécurité des archives, la mise à la disposition des travailleurs scientifiques. Il est fait d’après les circonstances. Parfois la loi le réglemente. Ainsi, dans certains cas, une nouvelle législation rend inutile les pièces antérieures. On a proposé de fixer le terme moyen de vingt-cinq ans, sauf à admettre des exceptions. Un duplicata du catalogue est transféré avec les archives. L’original cependant demeure à l’administration de manière qu’elle puisse à tout instant faire revenir les pièces dont elle aurait besoin. Les dépôts d’archives sont, en un certain sens, des succursales du service de documentation des administrations. Ils sont, pour les pièces du passé, « les Centrales des Centrales de documents »[1]. 2° Il est désirable que le traitement des archives courantes soit assuré de telle sorte, qu’après leur transfert aux dépôts d’archives, elles n’exigent plus qu’un minimum de classement et de catalogage. Si les archives administratives (documentation administrative, archives modernes) étaient bien classées au moment de leur constitution ce classement demeurerait après leur versement aux archives.

7. — Destruction des pièces.

Plusieurs pays ont arrêté des dispositions très précises pour la mise au rebut et l’élimination de certains documents d’archives (voir les règlements des archives anglaises et italiennes). Tout document officiel doit être tenu comme propriété de l’État. Toute administration doit avoir la faculté de transférer à tout moment aux archives

  1. J. Cuvelier. De la nécessité des versements périodiques des documents administratifs dans les dépôts d’archives. Rapport au Congrès International des Sciences administratives 1910. (4-1-12).