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ÉLÉMENTS GRAPHIQUES

surtout depuis la guerre mondiale, on les a multipliés en toutes langues. On a ainsi formé des mots conventionnels (ex. : U. R. S. S.) dont les syllabes, consonnes et voyelles, sont empruntées aux divers mots composant un nom, en particulier celui d’une association, d’une institution ou d’une firme.

3) Dans des travaux comparés et de synthèse, quand il s’agit de comparer, compléter, reviser les résultats de divers auteurs, d’en composer un exposé unique, collectif, coopératif, on a poussé l’abréviation jusqu’à représenter les ouvrages cités chaque fois en référence, par la simple initiale du nom des auteurs.[1]

Les abréviations sont une cause d’obscurité. Par exemple, dans les ouvrages d’histoire naturelle, le nom des auteurs en abrégé à la suite des termes taxonomiques.

Dans les livres scientifiques on écrit les longues expressions répétées à quelques lignes d’intervalle par les sigles de leurs principales lettres. Ex. : aksl, Altes Kirilulige slavisch.

4) Les abréviations jouent un rôle en Bibliographie.

En principe, elles ne sont pas désirables, puisqu’elles peuvent exiger du lecteur de se référer des abréviations à la Table de celles-ci.

Mais on a fait valoir qu’il y a là une économie matérielle qui peut chiffrer et qu’il s’agit encore plus de faire gagner du temps à ceux qui manient beaucoup d’indications bibliographiques. Il y a donc lieu d’organiser les abréviations et cela dans une double direction : dans chaque science et dans chaque paye d’abord ; dans tous les pays et entre toutes les sciences ensuite.

5) L’abus qui a été fait des abréviations les a fait proscrire par le législateur moderne. C’est pourquoi elles sont interdites en Belgique, notamment dans les actes de l’État civil, dans le Livre journal, dans les actes notariés et dans les copies de pièces. (Art. 42 du Code Civil, 65 du Code de Commerce, 24 de la loi de Ventôse, an XI).

222.23 Autres signes usuels.

Il existe un grand nombre de signes conventionnels utilisés en documentation. Avec les signes de correction typographique, les signes de soulignage et d’annotation de livres et de documents, etc.

Les signes suivants et d’autres possibles sont employés pour renvoyer aux références placées en marge ou au pied des pages. Lorsqu’ils sont épuisés, on peut faire usage de signes doublés.

* astérisque.
croix.
double croix.
section.
parallèle.
paragraphe = marque montrant qu’il y a un changement dans le sujet de discours.
doigt, index = attention, important.
l’Obèle, signe que l’on rencontre dans les anciens manuscrits. L’obèle marque la répétition des mêmes phrases et les mots surabondants ou les fausses leçons.
222.24 Notation universelle.

1. À parcourir les publications à cinquante ans de distance (1882-1932), il y a incontestablement un nouvel aspect de la page texte. Celle-ci était formée presque entièrement de texte compact, fait de caractères typographiques, à la première de ces dates. Voici que le texte maintenant est de plus en plus éliminé et refoulé, produisant un double effet en sens inverse : avec les images, les publications deviennent accessibles par un plus grand nombre de personnes : avec les schémas, les cartes, les diagrammes, les notations scientifiques, les formules mathématiques, le texte s’adresse à des lecteurs de plus en plus spécialisés.

2. Ainsi naît tout un nouveau langage graphique, langage composite, fait de l’emploi simultané de ces divers moyens d’expression. Il suffisait autrefois d’apprendre à lire les caractères alphabétiques. Il faut maintenant apprendre à lire, à comprendre les autres modes d’expressions graphiques. Et il y a de nouveaux « illettrés », et une sorte de nouvel analphabétisme. Avec les modèles des choses, avec leur représentation à la fois figurée plus concrètement et plus abstraitement, les problèmes reçoivent une compréhension meilleure et plus claire, les définitions sont plus précises, les différents êtres, états, phénomènes sont mieux séparés et classés, leurs rapports sont mieux déterminés. Finalement tout se mesure et les conséquences des mesures apparaissent sans difficulté.

3. Peut-être sommes-nous sur la voie d’une méthode universelle d’expression. Elle combinerait en elle l’essentiel de ce que nous donne : a) la considération logique des rapports et des systèmes de rapports ; b) la terminologie rationnelle ; c) la notation (symbolisme, algorithme) ; d) les procédés du calcul et des équations mathématiques ; e) la classification ; f) les formes de la documentation. Tout ce qui existe actuellement à l’état séparé dans ces six ordres d’idées qui s’étendent à la linguistique, à la mathématique, à la logique, à la documentation, ne serait plus considéré que comme des cas particuliers d’une théorie générale.

4. On aurait ainsi une notation pour l’ensemble de connaissances sur l’Univers et la Société. Ce serait là un progrès immense. Longtemps on a considéré les formules de Riemann, développées par Einstein, comme un échafaudage de symboles mathématiques, une ingénieuse algèbre. Voici qu’on est porté à y voir un des précurseurs d’une figuration de tout ce que comprend le

  1. Ex. Decroly : Développement du langage parlé chez l’enfant, p. 19.