Aller au contenu

Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

confuse de la perfection un souvenir, un dernier vestige d’une existence antérieure dont nous sommes déchus, le vide qu’a laissé à sa place un trésor qui nous a été ravi ? Ainsi du moins l’enseignent les plus vieilles croyances des peuples ainsi le pensèrent les plus beaux génies de l’antiquité Platon, et Cicéron après lui, ont éloquemment parlé de ces ruines de l’âme. Jamais, avant le Christianisme, la philosophie n’affirma, même en tremblant, la perfectibilité humaine. La raison, tant qu’elle demeure solitaire, ne saurait trouver nulle part la certitude de la loi du progrès.

Mais, si elle ne peut en administrer la preuve, peut-elle au moins en donner la mesure ? — Lorsqu’un voyageur marche au grand jour et que la lumière du ciel l’investit de tous côtés, il peut regarder derrière lui et savoir le chemin qu’il a fait ; devant lui, et connaître le chemin qui lui reste à faire mais, s’il va dans les ténèbres tenant un flambeau à la main, ce flambeau marche avec lui, éclairant à peine la pierre que son pied quitte et celle sur laquelle il va le poser ; et, n’apercevant ni son point de départ ni son but, le voyageur qui pour la première fois fait cette route ne sait ni quelle distance il a parcourue ni quelle distance il doit parcourir encore. Ainsi, tandis que l’homme poursuit sa marche ici-bas, il faut qu’il existe hors de lui une lumière intelligible, un ensemble d’idées absolues qui l’éclairent, et qui ne s’obscurcissent