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Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/166

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CHAPITRE VII

LA CHÈVRE


Cette année-là fut encore très dure pour Delphine Pâtureau. Elle devait un peu partout et le gage de Séverin avait été entamé dès l’entrée de l’hiver. Elle ne pouvait d’ailleurs pas travailler pour les autres avec une petite au maillot, une autre souffrante et deux garçons de quatre ans, fort espiègles.

Cependant, à Pâques, les bessons commencèrent à suivre Louise à l’école et leur mère fut un peu soulagée. Comme le bourg était à une bonne demi-lieue, les trois enfants emportaient leur pain et leur fricot pour le repas de midi. Delphine mettait dans leur panier tout ce qu’il y avait chez elle d’à peu près mangeable ; elle trouvait moyen parfois de leur donner des œufs, un œuf et demi plutôt, les bessons devant partager celui qui était entier. Mais aux jours de disette, ce lui était une grande peine de songer que les petits déjeuneraient d’un quartier de pomme ou d’une figue.

Louise, qui s’acquittait gentiment des commissions pour les gens du bourg, attrapait de temps en temps un morceau de sucre. C’était fête alors pour elle, et ses camarades étaient jalouses ; car sous les préaux