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Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/172

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— Biquette ! Biquette !

La chèvre tirait sur la corde et entraînait Louise ; les feuilles tendres broutées, elle se laissait ramener sur l’accotement couvert d’herbe épaisse. Mais deux minutes après :

— Biquette ! Biquette !

Georgette à dix pas secouait un rameau d’épine blanche aux bourgeons à peine ouverts : une friandise ! La chèvre relevait sa petite tête, bêlait de désir et délaissait encore la pâture sérieuse.

Georgette débauchait Biquette, et Louise, au retour, en faisait un beau chapelet à sa mère.

Heureusement les bessons n’étaient pas là pour embrouiller les choses. L’oncle Auguste les avait emmenés aux Arrolettes pour une quinzaine de jours. Quand ils revinrent, ils savaient parfaitement lancer des pierres avec un bâton fendu et fumer des tiges poreuses de clématites ; ils savaient non moins bien jurer et chanter des chansons d’hommes.

Biquette ne les étonna pas. Ils avaient vu bien d’autres chèvres aux Arrolettes ! et des moutons, et des vaches, et des bœufs ! Ils avaient même vu un bouc qui sentait très fort. Là-bas, Antonin, tous les soirs, menait boire les bêtes avec un grand fouet ; Constant était monté deux fois sur la jument blanche des Bordager.

Ils étaient devenus difficiles sur la nourriture ; leur tante les avait gâtés : ils avaient bu du vin le premier dimanche et mangé du lapin. À ce sujet, Constant ne put se retenir de faire des remontrances à sa mère.