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Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/20

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fumées grises se hâtaient de fuir, poursuivies par le vent du Bas-Pays qui apportait le bruit de cloches lointaines. La messe sonnait à Glazay, et Séverin marchait à grands pas, pour arriver là-bas avant la sortie ; il espérait y trouver son ancien patron, le meunier Bernou, qui le reprenait pour quelque temps à son service.

Une vague tristesse l’envahissait. Il aurait aimé un chez soi pour l’accueillir ; il n’en avait pas ; à vrai dire, il n’en avait presque jamais eu.

Il revoyait dans son souvenir le petit « creux de maison » où il avait vécu ses premières années. C’était une cabane bossue et lépreuse, à peine plus haute qu’un homme ; on descendait à l’intérieur par deux marches de granit ; il y faisait très sombre, car le jour n’entrait que par une lucarne à deux petits carreaux ; l’hiver, il y avait de l’eau partout, et cela faisait de la boue qui n’en finissait pas de sécher, sous les lits surtout ; il y avait des trous qui empêchaient les tabourets de tenir debout ; on les comblait de temps en temps avec de la terre apportée du jardin.

Il se souvenait pourtant d’avoir passé quelques bons moments dans cette maison, tout seul avec sa mère, sur la pierre du foyer. Elle était si douce, sa mère ! Malheureusement, elle était souffreteuse et ne pouvait pas travailler l’hiver ; il revoyait sa face pâle et son pauvre sourire courageux.

Le père, lui, avait eu un accident en sa jeunesse : une charrette lui avait écrasé une jambe et il boitait. Bien qu’il fût dur à l’ouvrage, il n’était pas recherché des fermiers à cause de son infirmité ; aussi ne se