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Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/72

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de l’auberge. Séverin regardait le cou rond où une fois déjà il avait mis ses lèvres, où il avait mis ses lèvres pour un baiser fou qui les avait liés d’amour. Il ne l’avait jamais quitté, le souvenir de ce baiser, et voilà qu’il l’animait encore ! Une grosse envie lui venait de goûter à ces joues fraîches, là, tout de suite, malgré les passants. Avec toute autre fille, il n’eût pas hésité, mais il n’osait pas, avec celle-ci.

— Allons, au revoir Delphine ! à dimanche !

Il lui tendit la main ; mais elle, ayant retrouvé sa malice depuis qu’elle était heureuse, se haussa sur la pointe des pieds et l’embrassa franchement sur les deux joues en disant, assez haut pour que les passants entendissent :

— Au revoir ! Embrasse marraine pour moi, et salue tout le monde de ma part, là-bas.

« À une heure et demie ! au second échalier dans le chemin de la Croix-Verte. »

Delphine n’avait eu garde d’oublier l’heure du rendez-vous. Arrivée la première, elle attendait Séverin qui tardait un peu. Comme deux heures sonnaient, elle l’aperçut enfin qui venait vers elle en se hâtant. Elle lui tendit les mains.

— Je croyais que tu ne viendrais pas, que tu avais voulu te moquer de moi ; je commençais à avoir peur.

— Oh ! fit-il, tu n’as pas eu cette idée ! Il est pourtant vrai que je suis en retard ; ce sont les autres qui