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Page:Pétrarque - Mon secret, 1898.pdf/146

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sous le poids de tant maux, parviendra-t-elle en rampant à cette source unique et très pure du vrai bien ? Puisqu’il en est ainsi, cesse donc de t’étonner qu’aucune passion de l’âme n’ait paru plus violente à Cicéron.

Pétrarque. Je suis vaincu, je l’avoue, parce que tout ce que vous dites vous me paraissez l’avoir tiré du livre de l’expérience. Et puisque vous avez cité l’Eunuque de Térence, je veux rapporter ici une plainte prise au même endroit : Ah ! quelle indignité ! Je sens maintenant toute ma misère. J’en ai honte, et je meurs d’amour. Je sais, je sens, je sais que je péris tout vivant, et je ne sais quel parti prendre[1]. Je veux aussi vous réclamer un conseil par la bouche du même poète : Réfléchissez donc bien pendant qu’il en est temps encore[2].

S. Augustin. Je te répondrai à mon tour par la bouche de Térence : Une chose qui n’a en soi ni raison ni mesure ne peut être gouvernée par la raison[3].

Pétrarque. Que faut-il donc faire ? Désespérerons-nous ?

S. Augustin. Il faut tout essayer auparavant. Voici en deux mots le meilleur conseil que je puisse te donner. Tu sais qu’il existe sur ce sujet, non seulement des traités spéciaux rédigés par d’excellents philosophes, mais des livres entiers composés par d’illustres poètes. Ce serait te faire

  1. L’Eunuque, 70-73.
  2. Ibid, 56.
  3. Ibid, 57-58.