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forces opposées, luttant simultanément pour la vie et pour l’influence.

Les oppositions de sens peuvent être elles-mêmes de deux sortes : extérieures ou intérieures. On peut appeler oppositions extérieures les oppositions de tendances, qui existent entre plusieurs hommes ou plusieurs groupes d’hommes. On appellera internes les oppositions qui se produisent entre tendances diverses d’un même homme.

Les oppositions externes ne sont pas du tout la même chose que les oppositions internes. En un sens, ces deux espèces de luttes sont incompatibles. En effet, dit M. Tarde, « c’est seulement quand la lutte interne a pris fin, quand l’individu, après avoir été tiraillé entre des influences contradictoires, a fait un choix, a adopté telle opinion ou telle résolution plutôt que telle autre, c’est quand il a fait ainsi la paix en soi-même que la guerre devient possible entre lui et les individus qui ont fait un choix opposé[1] ».

D’après M. Tarde, l’opposition sous ses trois formes, opposition de série, de degré et de sens, ne possède qu’un caractère accidentel, non permanent et nécessaire. C’est à tort qu’on croirait à des oppositions de série éternellement renaissantes (ricorsi de Vico) ou à des alternatives nécessaires d’augmentation et de diminution, de croissance et de décroissance dans la civilisation humaine. Il n’y a pas plus de régression nécessaire que de réversibilité nécessaire.

Enfin, c’est à tort également, selon M. Tarde, que l’on croirait à la nécessité et à l’éternité des oppositions de sens dans l’évolution des sociétés. Pour M. Tarde, l’opposition n’est qu’une période de transition entre l’imitation et l’adaptation. Elle ne joue qu’un rôle négatif. Sans l’invention et la propagation imitative de l’invention dues non à la mêlée des égoïsmes, mais à

  1. Tarde, Les Lois sociales, p. 79.