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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/157

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et meschantes. Les vns disoyent, si leur doctrine estoit bonne, ils prescheroyent publiquement : les autres disoyent, que nous nous assemblions pour paillarder, et qu’en nos assemblees, les femmes estoyent communes : les autres disoyent, que nous allions baiser le cul au diable, auec de la chandelle de rosine. Nonobstant toutes ces choses, Dieu fauorisa si bien nostre affaire, que combien que nos assemblees fussent le plus souuent à plein minuit, et que nos ennemis nous entendoyent souuent passer par la ruë, si es’-ce que Dieu leur tenoit la bride serree en telle sorte, que nous fusmes conservez sous sa protection, et lors que Dieu voulut que son Eglise fut manifestee publiquement, et en plein iour, il fit en nostre ville vn œuure admirable, car il fut enuoyé à Tolose deux des principaux chefs, lesquels n’eussent voulu permettre nos assemblees estre publiques, qui fut la cause, que nous eusmes la hardiesse de prendre la halle. Ce que nous n’eussions seu faire, sans grands scandales, si lesdits chefs eussent esté en la ville. Et qu’ainsi ne soit, tu ne peus nier, que depuis ces troubles, ils ne se soyent totalement appliquez à rabaisser, ruyner, et anichiler, enfoncer et abysmer la petite nasselle de l’Eglise reformee. Par là, ie puis aisement iuger, que Dieu les a tenus l’espace de deux annees, ou enuiron à Tolose, à fin qu’ils ne nuisissent à son Eglise, durant le temps qu’il la vouloit manifester publiquement : combien que l’Eglise eut de grans ennemis, toutesfois elle fleurit en telle sorte en peu d’annees, que mesme les ennemis d’icelle, à leur tres-grand regret estoyent contraints de dire bien de nos ministres, et singulierement de Monsieur de la Boissiere, parce que sa vie les redarguoit, et rendoit bon tesmoignage de sa doctrine. Or aucuns Prestres commençoyent d’assister aux assemblees, à estudier, et prendre conseil de l’Eglise : mais quand quelqu’vn de l’Eglise faisoit quelque faute, ou tort à quelqu’vn des aduersaires, ils sauoyent tres bien dire, Vostre ministre ne vous a pas conseillé de faire ce mal : et ainsi, les ennemis de l’Euangile auoyent la bouche close, et combien qu’ils eussent en haine les ministres, ils n’osoyent mesdire d’eux, à cause de leur bonne vie. En ces iours là, les prestres et moines furent blasmez du commun : sauoir est, des ennemis de la Religion, et disoyent ainsi, les Ministres font des prieres, que nous ne pouuons nier qu’elles ne soyent bonnes : pourquoy est-ce que vous ne fai-