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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/160

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uant lesdites prisons, ils disoyent en se moquant, Le Seigneur vous assistera, et luy disoyent encore, or dites à présent, Reuenge moy, pren la querelle : et plusieurs autres en frapant d’vn baston, disoyent, Le Seigneur vous bénie. Ie fus grandement espouuanté l’espace de deux mois, voyant que les portefaix, et belistreaux estoyent deuenus seigneurs aux despens de ceux de l’Eglise reformee : ie n’auois tous les iours autre chose que rapports des cas espouuantables qui de iour en iour s’y commettoyent, et de tout ce que ie fus le plus desplaisant en moy-mesme, ce fut de certains petis enfans de la Ville, qui se venoyent iournellement assembler en vne place pres du lieu où i’estois caché (m’exerçant toutesfois à faire quelqu’œuure de mon art), qui se diuisans en deux bandes, et iettans des pierres les vns contre les autres, iuroyent et blasphemoyent le plus execrablement, que iamais homme ouyt parler : car ils disoyent, par le sang, mort, teste, double teste, triple teste, et des blasphemes si horribles, que i’ay quasi horreur de les escrire : or cela dura assez long temps, sans que les peres ni meres, y missent aucune police. Il me prenoit souuent enuie de hazarder ma vie, pour en faire la punition ; mais ie disois en mon cœur le pseaume 79, qui se commence, Les gens entrez sont en ton heritage. Ie say que plusieurs Historiens descriront les choses plus au long, toutesfois, i’ay bien voulu dire ceci en passant, parce que durant ces iours mauuais, il y auoit bien peu de gens de l’Eglise reformee en ceste Ville.