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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/388

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DE LA MARNE.

de la canelle, apres que l’essence en a esté tirée. Ie te diray encores vn secret qui est que iamais le sel ne pourroit conseruer la chair de porc, ny la conuertir en lard, ny consequemment les autres chairs, si premierement le sel n’estoit dissout ; et si le sel ne faisoit que toucher à l’encontre sans se liquifier, il ne pourroit entrer au dedans, ny empescher la putrefaction. Voila pourquoy tu peux entendre que la marne qui est ia commencée à petrifier, si elle n’est premierement dissoute parmi le champ, les semences n’en pourroyent rien tirer, non plus que feroit vne chair d’vn sel qui ne se pourroit dissoudre ou liquifier. Ie m’efforce tant que ie puis de te faire entendre qu’il n’y a pierre, que si elle se pouuoit dissoudre à la cheutte des pluyes ou gelées, qu’elle ne seruit de fumier aux champs : par ce que toutes pierres sont formées, soustenues et endurcies par le mesme element cinquiesme, lequel accompagne toutes choses depuis le commencement iusques à la fin ; et faut que plusieurs choses ne craignent ny le feu, n’y l’eau, n’y aucune iniure du temps, tesmoing les terres argilleuses lesquelles ont esté causées de son action, et demeurent dedans les eaux sans aucun dommage, et estant formées en vaisseaux ou en briques, elles endurent le feu des fournaises, et mesmes les fournaises en sont construites.

Theorique.

Tu m’as dit cy dessus beaucoup de raisons, neantmoins ie ne suis pas satisfait touchant le moyen le plus expedient pour trouuer promptement de ladite terre de marne.

Practique.

Ie ne te puis donner moyen plus expedient que celuy que ie voudrois prendre pour moy : si i’en voulois trouuer en quelque Prouince où l’inuention ne fut encore connue, ie voudrois chercher toutes les terrieres desquelles les potiers, briquetiers et tuilliers, se seruent en leurs œuures, et de chascune terriere i’en voudrois fumer vne portion de mon champ pour voir si la terre seroit ameilleurée, puis ie voudrois auoir une tariere bien longue, laquelle tariere auroit au bout de derriere vne douille creuse, en laquelle ie planterois vn baston, auquel y auroit par l’autre bout vn manche au trauers en forme de tariere, et ce fait, i’irois par tous les fossez de mon heritage, ausquels ie planterois ma tariere iusques à la longueur de tout le manche, et l’ayant tirée dehors