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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/137

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LE ROMAN DE L’HISTOIRE.

récit. Il faut suivre l’esclave Sporus, glisser sur le lac bordé de vastes pelouses où bondissent, comme aux solitudes d’Afrique, les bêtes sauvages, parmi les ruines factices. Il faut franchir les bois de pins et de sycomores, dont les branches, versant la nuit épaisse, amortissent les cris plaintifs des chrétiens entassés dans la prison prochaine. Il faut contempler le divin empereur, vêtu d’une tunique blanche, couronné d’olivier, languissamment étendu sur un lit de repos, Lucius Nero, beau jeune homme à la barbe d’or, chanteur et maître du monde. Il faut, il faut céder au prestige de cette fantaisie qui rappelle à la vie les écritures mortes et les monuments disparus, — avec le regret qu’à la fin incapable de mesure, elle se traîne dans le plagiat prolixe. Mais on m’observe que les Martyrs ont devancé Acté. À quoi je réponds avec La Bruyère : « Horace ou Despréaux l’a dit avant vous. Je le crois sur votre parole, mais je l’ai dit comme mien. »

Au vrai, Dumas se plaît mieux en France. Cette histoire, que le peuple attend, lui apparaît comme une suite de romans, où la force et les passions se prêtent une aide mutuelle. L’énergie dont Stendhal demandait le pur type aux chroniques des xve et xvie siècles italiens, Dumas la trouve en son pays, aux xvie, xviie et xviiie siècles, sous la Ligue ou le Tribunal révolutionnaire. À feuilleter les écrits familiers de ces époques, il s’anime et s’amuse abondamment. Et, s’amusant lui premier, il n’ennuie jamais. Il sème à travers ses livres la gaîté en action. Il juge ses héros, il les houspille ; il a des mots sur leur compte : il leur en prête avec bon-