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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/73

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LE DRAME MODERNE.

pas la simplicité tragique, comme le prétendait J.-J. Weiss, mais une furie française, qui mêle les coups de force aux « scènes de feu ». Cette simplicité presque nue heurtait à ce point tous les usages que les acteurs de la Comédie-Française en furent effarés. Beaumarchais, au moins, avait dépaysé l’École des femmes dans le Barbier de Séville, et Lemercier Beaumarchais dans Pinto. Le recul même du xvie siècle suffisait, dans Henri III et sa Cour, pour atténuer par le repoussoir du décor l’audace toute neuve de l’inspiration. Mais voici le drame d’action, contemporain, social, en habit, entre quatre portants, le drame de passion qui éclate dans un salon du faubourg Saint-Honoré. Au premier acte, Antony arrête les chevaux d’Adèle à la force des bras ; au second, il lui arrache un cri d’amour par la violence dont il pousse le sentiment. Avec un tel gaillard nous ne saurions languir. En effet, nous ne languissons pas.

Au troisième acte, il casse le carreau d’une fenêtre, et, surprenant Adèle en prière, il l’entraîne par contrainte. Au quatrième, il défie le monde et lui montre les poings. Et à la fin, qui est le cinquième, il assassine Adèle dans un transport amoureux, et va ouvrir la porte au mari. D’acte en acte, à chaque péripétie, il semble que cet athlète tende ses muscles, reçoive le choc, tienne le coup, repousse l’obstacle et sonne la charge jusqu’à la catastrophe finale. « Ils ont dit que Childe Harold, c’était moi : que m’importe ? » insinue Dumas d’un air finaud. Il n’importe, en vérité ; il ne s’agit pas plus de Mélanie et d’Alexandre que des réminiscences lyriques, d’un lyrisme amer et postiche, retenues d’Hamlet,