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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/166

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LE DRAME D’ALEXANDRE DUMAS.

superstitions autant que les croyances sont pour la fantaisie un ragoût. Accessoires, trucs de théâtre, miroirs de réflexion, cela n’est point méprisable alors. Dumas pense fermement que son père mourut de langueur, pour avoir avalé quelque drogue des Borgia dans une prison d’Italie[1]. Cet état d’esprit fait partie de la légende napoléonienne. C’est la légende aussi qui détermine le caractère scénique d’Henri III, cet étrange contraste de mômerie et de volonté, de débauche et d’autorité, de cruauté et d’intelligence. Et cela même est populaire et bien français.

La pièce l’est à d’autres titres. Dumas remonte à Corneille par-dessus Voltaire et Racine ; c’est sa première attache. Dès longtemps, furent notés les emprunts faits à Don Sanche. Dans Christine il rend hommage au vieux dramatiste[2]. Dans Charles VII il se souviendra de Polyeucte[3], tout en imitant Andromaque, œuvre à demi cornélienne, au moins par le caractère d’Hermione. Corneille, père de la tragédie historique, imitateur de l’étranger, admirable dans la préparation des péripéties et par la logique, qui exalte les volontés et les caractères tout d’une pièce, fécond, toujours nouveau et enclin au mélodrame, était l’ancêtre désigné de Dumas[4]. Il en a un autre, aussi français, qui a plus influé sur lui et sur ce drame que Schiller et Scott même, c’est le maître ouvrier de notre scène moderne, le Beaumarchais du Mariage de Figaro. Il a le génie du théâtre ; il va droit au « machiniste ». Il se garde de se régler sur la Mère coupable, laissant cette

  1. Mes mémoires, t. I, ch. xiv, pp. 176 sqq.
  2. Christine, I, sc. i, pp. 212-213. Et l’acte III intitulé Corneille.
  3. Charles VII chez ses grands vassaux, IV, sc. iv, pp. 294-297.
  4. Des Dumas. Voir ci-après, p. 390. Cf, notre Théâtre d’hier, Alexandre Dumas fils, § II. Le système dramatique, p. 126.