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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/211

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DRAMES TRAGIQUES.

Descartes, qui meurt avant le premier acte ; l’autre pour symboliser sur le théâtre le remords en cheveux blancs. D’une part, couleur locale sans consistance, et de l’autre, philosophie de Pixérécourt, qui avait fort exploité la canitie du repentir. Au cours des cinq actes, Dumas est un révolutionnaire plutôt lent. Dans les deux premiers ce ne sont que souvenirs classiques ajustés d’une main novice aux réminiscences de Shakespeare, de Scott, de Goethe et de Schiller ; Cinna, Saint-Genest, Racine, Massillon, tout se mêle. Je cueille ces trois vers :

Allons supplier Dieu que ce jour soit prospère :
Dans son temple venez prier à deux genoux,
Car Dieu seul esl puissant. Vous, messieurs, suivez-nous[1].


Mademoiselle Mars, qui savait de mémoire les originaux, regimbait contre cette servile insurrection. Sous la broderie des vers d’emprunt, on assemble des lieux communs. Prenez une tirade au hasard : le métier de roi, de courtisan, l’âme de la foule entraînent toutes les considérations y afférentes[2]. Et l’on tient ces juxtapositions décousues d’une rhétorique fanée pour la moderne peinture des individus. On ajuste au monologue d’Auguste celui d’Hamlet, de Fiesque et de don Carlos[3]. Et l’on croit avoir fait revivre en Christine la femme et la reine. On prend pour poésie tragique le flux des tirades, le remous des mots, les paquets de développement déclamatoire. La scène du couronnement affecte la solennité de la délibération politique d’Auguste[4] ; elle est pleine de vide. Paula se guide sur Hermione et

  1. Christine, I, sc. ii, p. 215. Cf. « Allons sur son tombeau consulter… » « Dieu seul est grand, mes frères. »
  2. Christine, I, sc. iii, p. 217. « Je t’aimais, oui, Paula », etc.
  3. Christine, II, ii, pp. 225 sqq.
  4. Christine, II, vi, pp. 231 sqq.