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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/247

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DRAMES HISTORIQUES.

J’accorde que l’histoire n’est pas très intéressée en ces affaires. Pourtant qui ne voit qu’au fond Rome sauvée est l’apologie de Cicéron, c’est-à-dire de l’éloquence ; qu’en ce sens et dans cette mesure elle est « romaine, et non française »[1], étant tout entière orientée vers le couplet du Ve acte :

Romains, j’aime la gloire et ne veux point m’en taire[2],


que Cicéron y possède toutes les vertus[3], et que Voltaire en eût fait même un grand général, s’il avait pu — et si ce suprême mérite n’eût contrarié la tragédie historique, mais surtout éloquente, d’un humaniste, mais non pas d’un dramatiste ?

Le drame de Dumas est français et populaire d’abord, historique par surcroît, et tout justement au rebours de Rome sauvée. Il domine et asservit l’histoire, et la viole à force de la vouloir ressusciter. Il y a plus, dans l’œuvre de Dumas et Maquet, de ce qui illumine une époque. Ce n’est pas assez de dire que les textes ont été lus ; on les a dépouillés, sinon avec la perspicacité critique de Mérimée, tout de même avec une rare curiosité Imaginative. Salluste a plus fourni que Cicéron ou Plutarque, mais seulement parce que Catilina sera le protagoniste, et que, sauf dans le Pro Cœlio, Cicéron le noircit trop pour que le personnage ainsi conçu puisse mener à bien une pièce jusqu’au bout. Au reste, tout ce que l’histoire a pu offrir de détails propices à la mise en scène : décor, costumes, vie en plein air, mœurs et atmosphère, a été scrupuleusement utilisé. De ces leçons de choses, qui sont accessoires de spectacle, il y en a beaucoup dans Catilina. On y

  1. Rome sauvée, p. 216, note 1.
  2. Rome sauvée, V, sc. ii, p. 261.
  3. Voir Salluste, op. cit., ch. xxii, pp. 38 et 39. Cf, plus bas, p. 241, n. 1.