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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/405

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DUMAS PÈRE ET DUMAS FILS.

et du IV, et beaucoup du même esprit préventif, beaucoup de la même force et de la même ardeur, et pour tout dire, d’un semblable réalisme dramatique. Certes, il y a déjà autre chose dans la Dame aux Camélias ; mais cela premièrement. Romantisme, si l’on veut ; ou plus véritablement, énergique sensualité dans la peinture de la passion : Manon Lescaut, et non Marion de Lorme[1]. Cela est bien d’un Dumas.

C’en est un aussi, plus logique et concerté, mais non moins audacieux et fougueux, qui a écrit Diane de Lys. Je l’ai dit ailleurs en une étude du manuscrit original[2]. J’ai pu, sans trop presser le texte, faire voir à quel point, dans cette pièce où se précise le système dramatique de Dumas fils, — sujet, exécution, dénoûment, — il a repris Antony sans l’atténuer. C’est la comtesse qui séduit Paul Aubry ; et c’est le mari qui tue. Dans le manuscrit Diane avait une fille, comme Adèle, que le peintre acceptait, comme Antony[3]. Enfin dans cette première œuvre logique et légale, l’amant tombe en soupirant : « Ma mère[4] ! »

À partir de Diane de Lys, il est clair que Dumas fils, venu à une époque où les idées ont supplanté l’imagination, prétend peindre à même la vie et mettre la simple vérité sur la scène. Il est réaliste d’abord, selon une méthode rigoureuse et déductive, qu’il a pu retenir de

  1. Voir la Dame aux Camélias, II. sc. iv, p. 92, et surtout III, sc. vii, p. 139, citation de Manon Lescaut : « Je te jure, mon cher chevalier,… etc. » On notera d’ailleurs que le roman était très proche de celui de Manon Lescaut, qui est la vraie source. Après l’avoir vu, J.-J. Weiss discute, assez inutilement, à mon sens, la question de filiation entre la Dame aux Camélias et la Vie de Bohême (Le drame historique et le drame passionnel, pp. 198 sqq.). Cf. les Théâtres parisiens, pp. 109 sqq.
  2. Voir notre Génie et Métier, ch. viii, pp. 247 sqq.
  3. Voir ibid., pp. 248-249.
  4. Diane de Lys (Th., I), V, sc. v, p. 379.