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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/47

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L’HOMME ET SON ÉPOQUE.

tout romain et assez commode. Il se ravise. Bourgognino, fiancé de Bertha, entre, et devant lui, Verrina redouble le pathétique de la scène, interroge point par point, comme un juge, humilie, tourmente et maudit la malheureuse. El le style est digne de la situation : « Quoi ?… Quoi ?… Quoi ?… Qui ?… Qui ?… La taille comme la mienne, ou plus petite ? » — « Plus grande. » — « Les cheveux noirs ? Crépus ?» — « Noirs comme du charbon et crépus… …… La voix ? » — « Rude, une voix de basse[1]. » Je vous dis que la Tour de Nesle est une œuvre fade. Même il arrive que, pour concentrer l’émotion, Schiller incline vers un symbolisme assez ingénu. André Doria, ce tyran philosophe, contre qui Gênes se révolte, on ne sait trop par quelle fatalité, remet à Lomellino l’holocauste qu’il offre à son ingrate patrie, une boucle de cheveux blancs, la plus précieuse, la seule. «… C’était, leur diras-tu, la dernière qui restât sur ma tête, et elle s’en est détachée la troisième nuit de janvier, quand Gênes s’est détachée de mon cœur ; et elle avait tenu quatre-vingts ans ; et c’est à quatre-vingts ans qu’elle a quitté ma tête chauve[2]. « On ne saurait nier que cette suprême mèche et cette tête dénudée fassent ici une plaisante beauté.

Lorsqu’en 1784, Schiller voulut donner sa pièce à la troupe de Manheim, il fallut retoucher ces délicatesses. Le nouveau texte, entièrement remanié pour la scène, fut versé aux archives du théâtre de la ville. Boas l’imprima intégralement dans le troisième volume de ses Suppléments aux œuvres de Schiller[3]. On reconnaît dans ces remaniements les conseils d’un homme du

  1. La Conjuration de Fiesque à Gênes, I, sc. x, p. 227.
  2. Ibid., V, sc. xiv, p. 342.
  3. Nachträge zu Sclillers sämmtlichen Werken, von Eduard Boas, dritter Band, Stuttgart, 1828, Seit. 47-227. Die Verschwörung des Fiesko, Bühnenbearbeitung.