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Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/98

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LE DRAME D’ALEXANDRE DUMAS.

en 1781, et le troisième en 1787, pendant le séjour de Gœthe en Italie, qui la lit passer de la langue de la prose à celle des vers[1]. » Et le même critique, après nous avoir avertis que la tragédie « abonde en situations pathétiques et effrayantes[2] », et que « dans la gradation savante de cette fable, nous retrouvons tous les ressorts dramatiques de la tragédie grecque[3] », est obligé de convenir, à la fin de son chapitre, que, si l’œuvre est un noble effort de poésie, il faut « qu’on se garde d’y chercher un drame, car la vie dramatique y manque absolument[4] ». Même il observe que le caractère tout lyrique de cette pièce en rend la représentation très difficile. « Gœthe lui-même avouait qu’il ne l’avait jamais vue bien jouée, et Schiller la trouvait peu propre au théâtre[5]. » Nous ne disons pas autre chose.

Deux exemples suffiront à montrer combien peu Dumas pouvait apprendre de ce théâtre, qu’il avait lu comme tous les apprentis dramaturges de son temps. Gœtz de Berlichingen est une œuvre originale, étant la première adaptation marquante du génie de Shakespeare à l’esprit allemand. On l’a dit et bien dit : « C’est de là que procède Walter Scott et le théâtre romantique français, qui procède de Shakespeare beaucoup moins que de Scott[6] ». Œuvre originale, et drame indigeste, quelque chose de gigantesque et d’inachevé, en deçà de l’organisation vitale. Jamais le mot ne fut mieux en sa place : ce sont les fragments épars d’un

  1. W. Gœthe, Les œuvres expliqués par la vie, 1749-1795, ch. vi, p. 275.
  2. Ibid., p. 276.
  3. Ibid., p. 279.
  4. Ibid., p. 284.
  5. Ibid.
  6. Ibid., ch. ii, p. 96.