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Page:Paris - François Villon, 1901.djvu/94

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FRANÇOIS VILLON.

riches amateurs et copiés dans de rares manuscrits : Il y a plus de chances pour qu'il ait lu, dans des copies plus ou moins récentes, quelques-uns des longs poèmes de la dernière période épique : nous voyons par ses allusions qu'il connaissait la légende de Berte aux grands pieds et la vieille geste d'Oger le Danois avec la suite merveilleuse qu'on lui avait faite. C'est peu, comme on le voit : il n'avait sans doute lu, dans sa forme primitive, aucun des poèmes où l'âme de la France avait jadis trouvé une si originale expression ; il n'avait pas fréquenté la vieille forteresse de l'épopée féodale, déjà tombée en ruines et en poussière.

Connaissait-il mieux le palais incohérent et merveilleux, aux tourelles fantastiques, aux promenoirs inextricables, aux sculptures étranges, qui avait commencé au xII e siècle à s'élever, sous une inspiration celtique bientôt oubliée, autour de la Table Ronde du roi de Bretagne, et où erraient, en aventures incessantes d'armes et d'amours, Lancelot et Guenièvre, Tristan et Iseut, Perceval, Galaad, Palamède et tant d'autres ? De ces poèmes-là aussi la production, si féconde à la suite de Chrétien de Troyes, s'était vite ensablée ; les derniers romans arthuriens en vers, faibles et longues imitations, avaient été composés vers la fin du xIIIesiècle et ne se lisaient plus au xVe; le Méliador de Jean Froissart était un véritable anachronisme et n'était guère accessible sans doute en dehors des manuscrits de luxe où le poète l'avait offert à ses protecteurs. Mais les romans en prose de ce cycle, faits d'abord à l'imitation des romans en vers, puis de plus en