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Page:Pascal - Pensées, 2e édition G. Desprez, 1670.djvu/429

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d’une réputation glorieuse et d’une santé robuste. Et pourquoi les ai-je réputés heureux, sinon parce que tous ces avantages leur fournissaient une facilité très ample de jouir des créatures, c’est-à-dire de vous offenser ? Oui, Seigneur, je confesse que j’ai estimé la santé un bien, non pas parce qu’elle est un moyen facile pour vous servir avec utilité, pour consommer plus de soins et de veilles à votre service, et pour l’assistance du prochain ; mais parce qu’à sa faveur je pouvais m’abandonner avec moins de retenue dans l’abondance des délices de la vie, et en mieux goûter les funestes plaisirs. Faites-moi la grâce, Seigneur, de réformer ma raison corrompue, et de conformer mes sentiments aux vôtres. Que je m’estime heureux dans l’affliction, et que, dans l’impuissance d’agir au dehors, vous purifiiez tellement mes sentiments qu’ils ne répugnent plus aux vôtres, et qu’ainsi je vous trouve au-dedans de moi-même, puisque je ne puis vous chercher au-dehors