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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/514

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L’ÉTAPE

parlé, » continua-t-il, « je le croyais catholique d’intelligence et de cœur, et qu’il n’hésitait que devant une dernière démarche. Je me suis cru le droit de presser cette dernière démarche, et dans ce cas-là, je l’avais. Ne m’interromps pas… Je m’étais trompé, et si je persiste à penser que la crainte de te peiner a été pour beaucoup dans ses hésitations, je les ai trop vues pour ne pas reconnaître qu’elles tiennent aussi aux derniers doutes de son intelligence… Alors je me suis fait un scrupule de la condition que je lui avais imposée. J’ai senti ma fille malheureuse. Lui-même, quand il est venu pour cet argent, il m’a fait une telle pitié… J’ai écrit à Rome, le jour même de sa visite, pour savoir s’il me serait permis de marier ma fille religieusement à quelqu’un qui n’appartiendrait à aucune religion. J’ai reçu la réponse ce matin… Je ne t’attendais pas. Lis… »

Il prit dans un des tiroirs de son bureau une enveloppe qu’il tendit à l’ennemi de toutes ses croyances. Elle portait un large cachet de cire rouge sur lequel étaient empreintes des armes surmontées d’un chapeau de cardinal. La lettre que contenait cette enveloppe commençait ainsi ; « Cher Monsieur, j’ai puisé mes renseignements aux meilleures sources sur la question que vous me posez, et voici la réponse que vous pouvez considérer comme certaine. La dispense dont vous me parlez est tout à fait extraordinaire et n’est point accordée par la Daterie ni par la Sacrée Pénitencerie. Il est possible de l’obtenir de la Congrégation du Saint-Office, pour