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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/94

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L’ÉTAPE

répondit Jean. « Quel est le premier article de notre Union ? — Une maison où des hommes de toute situation se réunissent en vue de leur éducation mutuelle, morale et sociale ; — et, le second : l’Association est indépendante de tout caractère politique et religieux. Qui dit éducation mutuelle dit forcément libre discussion. Qui dit indépendance politique et religieuse dit libre exposé de toutes les doctrines politiques et religieuses. Nous avons eu, dans le comité, une première séance très chaude. Quelques-uns d’entre nous, le cousin Riouffol notamment, sont opposés à cette idée. C’est Crémieu-Dax qui a fait remettre le vote à ce soir. Il est pour admettre M. l’abbé Chanut, et il a cité, dans le petit discours qu’il nous a fait, avec un commentaire très éloquent, je dois en convenir, quoique je n’aime pas cette autorité, le mot de Robespierre à Couthon, quand celui-ci, à l’Hôtel-de-Ville, lui demanda d’écrire aux armées. Mais au nom de quoi ?… »

— « Mais au nom de la raison, » dit Monneron plus vivement encore, « et de la liberté… Mais oui, » insista-t-il, devant l’étonnement que son fils laissait voir malgré lui sur son visage. « Ce M. Chanut, puisqu’il est prêtre, croit à la révélation et au surnaturel. Il abdique donc sa raison. Par conséquent, nous n’avons pas à discuter avec lui. C’est lui qui a renoncé le premier à son droit de libre discussion. Il n’a pas à le réclamer. Ou bien qu’il dépouille sa soutane de prêtre, qu’il vienne vous dire : « Je ne crois pas, je cherche à