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Page:Paul Vibert - Mon berceau, 1893.djvu/299

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CONTE DE NOËL

y plaça la belle câlin de 4 sous, et avisant un fort clou au plafond, il s’y pendit.

 

Le lendemain matin, en pénétrant dans la chambre, la voisine trouva une femme morte dans le lit, une pâle et pure vision de martyre.

Un cadavre se balançait lentement au plafond, avec des mouvements rhythmiques très doux : c’était le père.

Devant les cendres froides, aux pieds de l’âtre sans feu, image de cette misère et de ce désespoir, les enfants assis par terre tenaient les souliers du père entre les jambes et berçaient tour à tour, avec beaucoup de précaution et de tendresse, la jolie catin en carton.

 

La Ville — cette grande famille — les a élevés ; voilà de cela treize ans passés, demain nous en ferons de bons citoyens et de bons républicains. Et lorsque je revois aujourd’hui les orphelins vigoureux et bien portants, je pense malgré moi à cette lugubre nuit de Noël de 1879, et mes yeux se mouillent, en évoquant ces tristes souvenirs !