Aller au contenu

Page:Paul Vibert - Pour lire en bateau-mouche, 1905.djvu/353

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 326 —

ment en promiscuité plus ou moins dangereuse avec les chevaux de fiacre, toujours plus ou moins mourant de faim, comme disait un de mes amis qui, en parlant de la Compagnie des Petites Voitures, certainement a ri d’elle !

Mais je poursuis, mon cher ami, pour bien vous démontrer toute la gravité de la situation actuelle : à Paris, certes, nos femmes savent se coiffer délicieusement, comme elles savent s’habiller, et leurs chapeaux sont de véritables pièces montées… avec art ! Nonobstant, la plupart de ces chapeaux sont couverts de fleurs et c’est précisément là où, tout à la fois gisent l’erreur et le danger et pour ne pas être taxé d’exagération, je vais vous le démontrer en cinq sec.

Prenez justement, non pas les grandes dames qui sont souvent des dames grandes et passent plus haut que la tête des chevaux, mais toutes les demoiselles de magasins, les petites bourgeoises, les trottins pressés, les femmes qui vont à pied, comme la légendaire ouvrière de la chanson, portent toutes d’immenses chapeaux couverts de jolies fleurs. C’est charmant, mais mortellement dangereux, car, à la moindre bousculade, à la moindre presse, les pauvrettes se trouvent poussées à la tête d’un cheval, le long de la chaussée, les plus audacieuses passent même sous la tête des chevaux arrêtés le long du trottoir pour traverser la rue et crac, Le cheval aguiché par les couleurs vives, et poussé par le démon tentateur de la gourmandise, ouvre une large bouche,