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somme et tous mes papiers, j’ouvrais l’œil, toujours trop tard naturellement.

Cependant, à Nîmes, monta un jeune et brillant cavalier dans mon compartiment, avec une moustache noire à décrocher tous les cœurs du Midi !

Je fis lâchement comme l’industriel de Rouen, j’amenai la conversation en lui offrant un cigare et, au bout d’une demi-heure, nous étions les meilleurs amis du monde… seulement j’étais très boutonné, toujours trop tard naturellement.

Après lui avoir expliqué comment et pourquoi je faisais une tournée de conférences du plus haut intérêt dans tout le Midi, j’attendis et lui spontanément, tout gentiment, me dit :

— Ma foi, c’est bien peu lucratif votre métier d’économiste ; moi, je suis tout simplement régicide.

— Diable ! mais il doit y avoir des risques ?

— Il n’y en a qu’un, celui d’être écharpé par la foule indignée, toujours bête et qui ne comprend rien aux choses de la politique.

— Et ça vous rapporte ?

— Oh ! beaucoup, je suis très bien payé, surtout si le travail est bien fait.

— Et vous avez tué beaucoup de rois, d’empereurs ?

— Moi, jamais de la vie !

— Mais qui vous paye ?

— Les monarques, parbleu !

— Je ne comprends pas du tout.