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Page:Paul Vibert - Pour lire en bateau-mouche, 1905.djvu/495

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la plus belle clientèle du monde entier, Et tenez, voici les Présidents de République eux-mêmes qui m’envoient chercher ; mais, vous savez, c’est moins bon, ça ne paye pas si cher.

— Vous devez cependant avoir des mortes saisons.

— Sans doute, mais quand un souverain est content et vous a fait donner cinquante mille balles, on a le temps de se reposer. Et puis je fais entre temps, pour m’amuser, des petites bricoles. Ainsi, voilà vous, par exemple, qui venez de publier vos Causeries agricoles ; eh bien vous voulez les lancer ? J’ai un fameux moyen : je me déguise en prince russe anarchiste, je vous provoque en duel dans un grand café de Marseille et vous fais une égratignure au poignet. Vous me laissez gagner la frontière où je redeviens un simple sujet italien ; la police perd mes traces. Vous faites un potin de tous les diables dans la presse et huit jours après votre volume est lancé. Est-ce imaginé ça ? Et pour vous, je ferai la chose au plus juste prix, par amitié, pour un billet de mille francs. Que voulez-vous, il faut savoir se pousser dans le monde !

Le train était en gare de Tarascon ; je pris congé de mon aimable régicide pour rire et je poursuivis mon voyage, émerveillé de l’ingéniosité de certains hommes pour trouver des positions sociales vraiment épatantes !