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Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/327

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j’ai déjà citées, c’est le parfait silence organisé sur les boucheries de Paris. Qui croirait qu’à ce moment il y eut un tel massacre qu’on a craint la peste ? Personne n’a l’air de s’en douter. L’homme arrêté dans la rue, par n’importe qui, pour son costume, devient un inculpé arrêté régulièrement pour « participation à la Commune ». Puis cet inculpé, tout à coup, se perd, s’évapore, comme par miracle !… Rappelez-vous les difficultés pour retrouver la trace d’Émile B…, fusillé au Châtelet. Même hypocrisie de toutes les pièces officielles. Une vaste conspiration de silence succède aux horreurs de Mai. Elle dura encore six ou sept ans après : elle dure encore aujourd’hui. Les fusilleurs, à peine leur atroce besogne finie, s’enveloppent du manteau de Tartufe. Pour rien au monde, vous ne leur arracheriez l’aveu d’une seule exécution. Il y a eu seulement dans Paris des « inculpés » qui se sont « égarés ». Et M. Thiers, et M. Dufaure, dès 1871, et depuis tous les conservateurs et tous les modérés, jusqu’au jeune Casimir Périer petit-fils, répéteront imperturbablement, dès que les vingt ou trente mille cadavres seront recouverts de terre, — qu’il n’y a eu de répression que par les tribunaux réguliers !

Or, le camarade de Popp, César Huberty, a raconté quelque chose de plus que ce qu’il pouvait dire dans une lettre adressée des pontons, et lue par conséquent par les gardiens.

On sait comment, au Châtelet et ailleurs (nous reverrons le même procédé à Mazas), on faisait passer les prisonniers ou à droite, ou à gauche pour indiquer qu’ils seraient envoyés à Satory ou fusillés.

Or, Huberty déclare qu’une fois qu’ils étaient arrivés à Mazas, on l’a fait passer à droite, tandis qu’un officier disait à Popp, en lui indiquant le côté gauche :