Aller au contenu

Page:Pellissier - Le Mouvement littéraire au XIXe siècle, 1900.djvu/311

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
303
LA POÉSIE.

de souffreteux, que nous ne trouvons pas chez Coppée, avec lequel il ne soutient la comparaison ni comme écrivain poétique ni comme conteur.

Les personnages que Coppée excelle à peindre sont ceux de la vie ordinaire et du petit monde. Dans le Reliquaire il montrait la Sainte, vieille fille en cheveux blancs qui a sacrifié sa jeunesse et sa beauté pour soigner dix ans un frère infirme ; dans les Poèmes divers, c’étaient les Aïeules se chauffant au soleil, les deux mains jointes sur leur bâton ; dans les Intimités, la petite bouquetière qui, grelottant au coin d’une porte, offre des violettes entre ses doigts glacés par la bise. Les deux recueils suivants sont particulièrement consacrés aux misères obscures, aux humbles tendresses, aux bonheurs qui se cachent. Une nourrice qui, de retour au village, trouve dans un coin le berceau de son enfant mort ; un ménage d’anciens boutiquiers, retirés dans une maison tout près des champs, avec un carré de jardin où le mari se promène, un sécateur à la main, tandis que la femme tricote sous le bosquet ; une servante et un militaire échangeant à voix basse sur le banc d’un jardin public leurs soucis déjà consolés par l’amour, voilà les héros qu’affectionne le poète. Et il s’intéresse sincèrement à eux ; il est ému des angoisses de la nourrice, il envie la félicité débonnaire de ses petits rentiers, il ne trouve pas si ridicule l’idylle de la bonne et du « tourlourou ».

Au fond, Coppée est resté naïf. Jusque dans la première effervescence de la jeunesse, il se prenait souvent à imaginer pour lui quelque bonheur « très long, très calme et très bourgeois ». Il voudrait, à trente ans, être vicaire eu un tranquille évêché, ou bien membre de quelque académie provinciale. Si toutefois « ce pâle enfant du vieux Paris » pouvait consentir à s’en exiler ! Mais il aime Paris « d’une amitié malsaine ». Devant la vaste mer et les pics neigeux il rêve de coteaux pelés, d’un bout de Bièvre. Ce qu’il chante de la grande ville, ce sont les trottoirs des rues à l’heure où les boutiquiers viennent prendre le frais, les faubourgs pleins d’enfants qui s’ébattent, ce sont surtout,