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Page:Perey - Histoire d'une grande dame au XVIIIe siècle, La comtesse Hélène Potocka, 1888.djvu/449

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LA COMTESSE HÉLÈNE POTOCKA.

Les récits d’Hélène, malgré l’exagération qu’on peut leur reprocher, n’en reflètent pas moins les sentiments d’une classe nombreuse de la société et donnent bien l’impression de la mobilité inouïe qui nous caractérise. Le 30 mars 1814 on se tue aux barrières de Paris, les rues sont encombrées de brancards et de chariots transportant les blessés, douze mille morts du côté des Français sont ramenés dans la ville. Le lendemain l’Opéra regorge de monde et on offre au vainqueur le Triomphe de Trajan, qu’il refuse par modestie. Ce même peuple, qui acclamera le 20 mars 1815 la rentrée de Napoléon dans sa capitale, se rue aujourd’hui sur les cocardes blanches.

Hélène, aussi mobile que les Français, ne tarit pas en éloges sur les Russes, dont elle haïssait jadis la domination en Pologne et qu’elle appelait nos insolents oppresseurs. Elle raconte qu’on avait fait courir le bruit à Paris, dans le peuple, que l’armée russe était une horde de barbares, sales, déguenillés et hideux. « Quand on les vit, on entendait de tous côtés : — Qu’ils sont beaux ! qu’ils sont polis ! et les acclamations retentissaient. »

« Il était venu, dès le matin, beaucoup de cosaques pour différentes commissions, ils regar-